مقالة تحمل تقرير جميل عن احداث سيناء خلال عام من حكم مرسي..

Al-Qaida passe du Mali en Libye

L’étrange relation entre Mohamed Merah et Bernard Squarcini



Un jeune de banlieue particulièrement perturbé qui entre en confidence avec les fonctionnaires des services spéciaux français : on aura tout vu, décidément, sous la présidence de Nicolas Sarkozy. Car ne nous leurrons pas : c'est bien ce qui s'est passé, au point aujourdhui d'en arriver à regarder tout autrement ce qui s'est passé à Toulouse. En ce moment, on le voit tous les jours, les américains, via leurs drones tueurs, liquident un par un tous leurs anciens amis talibans. Sysématiquement. Ceux qui les ont tant aidés jadis à repousser les soviétiques en Afghanistan. J'avais écrit il y a quelque temps qu'ils effectuaient un solde de tout compte, ce faisant. Partir du pays, certes, mais en ne laissant derrière eux rien qui puisse ressurgir un jour de leurs agissements et de leurs compromissions avec ceux qu'ils vitupèrent tous les jours depuis qu'ils se sont retournés contre eux. En France, nous ne possédons pas de drone (sinon des copies israéliennes recarossées par Serge Dassault, pour nous les vendre à un prix exorbitant). Mais nous pratiquons de même, en éliminant ceux qui, à un moment de leur vie, ont pactisé avec des services placés aujourd'hui au pied du mur et forcés de révéler leurs liaisons douteuses. Et même apeurés par les possibles révélations, à en avoir pris les devants aujourd'hui dans les colonnes du Monde.



Mohammed Merah lui aurait dit, à lui où à un de ses fonctionnaires "de toute façon, je devais t'appeler pour te dire que j'avais des tuyaux à te donner, mais en fait, j'allais te fumer (*)," finit par lâcher Bernard Squarcini dans une interview sollicitée au journal le Monde pour tenter de masquer son rôle délétère dans ce qui devient une histoire sordide, comme si les meurtres d'enfants d'une école juive ne l'avaient pas encore assez été. Qu'est-ce qui peut faire qu'un paumé de banlieue de 23 ans puisse parler sur ce ton à l'instance la plus haute, en France, des services de sécurité du pays ? D'où lui est venu cette familiarité, à ce jeune meurtrier qui écrivait pourtant à son juge sur un ton très respectueux ? Pourquoi en était-il arrivé à autant de familiarité avec ce fonctionnaire ou ses subordonnés ? Pourquoi en être arrivé à vouloir souhaiter tuer celui qu'il aura eu pendant des mois comme interlocuteur privilégié ? S'est-il senti trahi ? Pourquoi en est-il arrivé, avant de voir sa vie se terminer au bout de l'entonnoir qu'il s'était construit, ou qu'on lui avait fabriqué, à vouloir dire qu'il avait "mis la France à genoux ?" En quoi pouvait-il penser l'avoir fait en commettant de pareils actes ?



Pour une raison simple : on lui avait confié un rôle. Un double rôle, à l'évidence. Le jeune jihadiste devait en avoir à nous dire, en effet. Et mort, Bernard Squarcini s'est empressé de parler à sa place. Tellement rapidement que le soupçon n'est même plus supposé. Le lendemain même où le pantin terroriste été retrouvé en bas de son immeuble criblé de balles, l'homme qui avait demandé à le rencontrer à l'automne 2011 est venu aussi vite parler à sa place, pour nous dresser un tableau hallucinant du personnage, mais aussi et encore plus de ses propres relations avec lui. A dresser le tableau de quelqu'un qui le connaissait très bien depuis... 2007. Celui d'un jeune de banlieue sans le sous, ou vivant d'un RSA (un peu plus de 400 euros par mois) ayant déjà fait tamponner son passeport dans neuf pays, et non des moindres. Mais laissons donc le "Squale" en dresser lui-même la longue liste : "il a passé du temps chez son frère au Caire après avoir voyagé au Proche-Orient : Turquie, Syrie, Liban, Jordanie, et même Israël. A Jérusalem, la police découvre un canif dans son sac puis le relâche. Ensuite, il se rend en Afghanistan en passant par le Tadjikistan. Il prend des parcours qui sont inhabituels et n'apparaît pas sur nos radars, ni sur ceux des services extérieurs français, américains et locaux. Il arrive le 13 novembre à Kaboul, il est contrôlé le 22 novembre à Kandahar et il rentre en France le 5 décembre 2010." Neuf pays vous ai-je dit : oui, car à la liste, il faut aussi ajouter le Pakistan et même... l'Iran, qui comme chacun le sait, est un pays où l'on rentre très facilement... c'est bien connu !!! "Un autre élément troublant sur les déplacements de Mohamed Merah reste à éclaircir : sa présence en Iran "à deux reprises" d'après une source militaire française en Afghanistan. Interrogée par Le Monde, mercredi, la DCRI, chargée du contre-espionnage et de la lutte antiterroriste, a démenti ce séjour" apprend-t-on encore ce jour.



En fait, fort étrangement, ce n'est même pas le gros poisson de la sécurité française qui prend les devants en 2010. C'est le jeune de banlieue, fiché pourtant comme délinquant à surveiller par la police ou la médecine psychiatrique, qui décroche son portable et appelle Squarcini en personne : et il ne le fait pas alors qu'il est rentré, non, il le fait... à partir du Pakistan même. Tout le monde sait bien que c'est d'un naturel fou, pour un gamin de Toulouse qui avant ses voyages à 21 ans n'a jamais mis les pieds au dehors de la ville rose, à part une petite incursion en Espagne, d'appeler de son propre chef les services de renseignements français, au prix où sont les communications téléphoniques, même au fin fond d'une échoppe de communication pakistanaise : " Mohamed Merah l'appelle le 13 octobre 2011 car il n'est pas en France à ce moment-là, il est au Pakistan. "Dès que je rentre, je vous contacte", a-t-il dit. Le 3 novembre, il rappelle de l'hôpital Purpan, à Toulouse, ou il est hospitalisé pour une hépatite. "Dès que je sors, je viens vous voir", assure-t-il. Il fait preuve d'une excellente coopération, d'éducation, et de courtoisie" raconte le chef du renseignement français. Car, fait totalement hallucinant pour celui qui a déjà eu maille à partir avec la police locale (au point de vouloir dégommer son représentant !) ; et vient de sortir d'une période de 9 mois de prison (pour une condamnation à 18 mois, preuve qu'emprisonné il s'est montré plutôt coopérant, pour une tête brûlée manifeste), celui qui possède un casier judicaire lesté de 15 condamnations pour des faits sérieux (dont des agressions physiques), vient tranquillement causer le bout de gras avec un fonctionnaire de la police du plus haut niveau (Squarcini parlant d'un de ses afjoints comme interlocuteur). Et c'est lui qui propose le rendez-vous ! Un fonctionnaire un peu à côté de ses dossiers, puisqu'il oublie de lui parler ce jour-là d'une interdiction de prendre un avion américain, pour le cas où il y aurait une prochaine fois de programmé pour ses talents évidents de voyageur sans le sou vaillant.



Les autres services secrets, ceux de la concurrence pourrait-on dire, qui ont stipulé en 2011 que la rixe à laquelle a participé notre excité vient de lui fermer définitivement la porte des voyages sur les lignes US. C'est la deuxième fois, en prime, que les services US envoyaient la menace à leurs collègues français. la première fois, c'était en 2010... et ce sont eux qui avaient payé le retour à la case départ du Toulousain. Ce que raconte, toujours à sa façon, son illustre confident Squarcini : "après un simple contrôle routier à Kandahar, en Afghanistan, en novembre 2010, qui est effectué par la police afghane. Ils le remettent aux Américains qui l'ont forcé à remonter dans l'avion pour rentrer à Kaboul. La direction de la sécurité et de la protection de la défense (DPSD), un des services de renseignement des armées, nous a signalé l'incident". Un an avant que le jeune homme se propose de venir s'expliquer, les gens à qui il s'adressaient savaient déjà tout de lui, via l'ambassade française au Pakistan et celle d'Afghanistan qui avaient averti la France du "cas" Mérah. On a dit qu'il avait un "lourd passé", à Toulouse. Ailleurs aussi, sans nul doute !



Un cas passionnant en effet : débarqué devant les fonctionnaires, raconte toujours l'homme à l'allure du prédateur des mers, dont il a gardé le surnom, voilà notre étrange Phileas Fogg de banlieue venir étaler ses photos de vacances, assure le proche de Nicolas Sarkozy, avec un Merah qui le prend bien entendu au mot, dans une séquence qui tourne au surréalisme : "il vient à l'entretien avec sa clé USB qui contient ses photos de voyages. Il demande à s'allonger sur la table pour pouvoir discuter parce qu'il est malade, dit-il. Il explique en photos tout le parcours touristique qu'il a réalisé au Proche-Orient, en Afghanistan et au Pakistan. " Un fonctionnaire des services de renseignement qui feuillette un album de photos "familial" ou de randonnée et semble s'en contenter, avouez que c'est tout aussi rare qu'un tueur en scooter qui circule sur un engin dont on connait la trajectoire au mètre près grâce à sa puce émettrrice incorporée ! Sidérante scène !!! Racontée ce jour par Bernard Squarcini en personne !



Alors, reprenons un peu nos esprits, choqués à la fois par les crimes commis et par ce qu'on lui a demandé de faire quelques mois auparavant, à ce Mohammed en scooter. Les américains, a-t-on dit, ont déclaré le jeune banlieusard persona non grata au Pakistan. Très bien, découvrons exactement pourquoi, en examinant où notre photographe de vacances s'est rendu pour remplir sa clé USB. Pour cela, il suffit de demander à son frère. Ou à sa mère, tiens, plutôt. Cette dame, qui semble bien avoir eu tout le mal du monde à élever ses enfants après que son mari ne l'ait quittée pour rentrer en Algérie, s'est depuis remariée. Avec un monsieur dont le nom de famille est Essid. Un nom que les fonctionnaires de la DGSE de l'époque connaissaient bien : ce monsieur a en effet lui-même un fils, qui s'appelle Sabir Essid. En 2007, en Ariège (et donc a proximité immédiate de Toulouse), il avait fait parler de lui, ce garçon. Et pas qu'un peu, car la presse titrait alors "une filière terroriste démantelée à Toulouse". Une filière où des noms étaient apparus. Et mieux encore : une filière bien connue de la DGSE ! Qui emmagasine dans ses ordinateurs regroupés en "clusters" dans une immense salle blanche des millions de fichiers, sur des prérendants au terrorisme... ou sur les groupes de djihadistes, alors que Mérah continue à être présenté comme un "loup solitaire"...



A l'époque, comme récemment, on avait indiqué la méthode pour les "surveiller" : "La détection d'un islamiste radical parti pour l'Afghanistan ou envisageant de le faire commence souvent dans le secret du bureau d'un magistrat antiterroriste ou d'un policier de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Les enquêtes en cours sur les « nouvelles filières afghanes » permettent d'identifier les membres des groupes plus ou moins organisés envoyant des « volontaires ». Chaque individu et ses proches font l'objet d'une surveillance. Les écoutes téléphoniques, les interceptions Internet, les témoignages recueillis dans l'entourage, l'aide éventuelle d'indicateurs permettent souvent de « découvrir » un ou plusieurs nouveaux djihadistes." Une méthode qui n'a donc pas marché, mais le Figaro comme le Squale ont la solution à ce dysfonctionnement : "Cette détection ne connaît qu'une seule faille : elle suppose l'existence d'un réseau, même informel. Un homme seul partant par ses propres moyens a des chances de passer inaperçu. Selon les déclarations du procureur de la République de Paris, ce serait le cas de Mohamed Merah, parti pour l'Afghanistan sans passer par des « facilitateurs » liés à des groupes radicaux". D'où le pilonnage de la presse actuellement pour présenter la thèse du loup... agissant seul. En Ariège, c'est vrai que les loups on connaît... "Chercheuse à la chaire d'histoire du monde arabe du Collège de France, Nora Benkorich note que dans la mesure où des témoignages et plaintes ont montré que Merah pouvait avoir un comportement dangereux, les autorités "ont plutôt intérêt à miser sur un loup solitaire chez qui les meurtres ne pouvaient pas être anticipés", note finement Rue89.



En 2007 en prime, c'était déjà une répétition, car"ce n'est pas la première fois que de jeunes extrémistes se revendiquant d'Al Qaïda font parler d'eux à Toulouse" écrivait alors la Dépêche. "Preuve de l'enracinement d'un phénomène inquiétant dans les cités, comme du travail de fond de la mouvance salafiste. Fin 2006, en Syrie, non loin de la frontière avec l'Irak, deux jeunes hommes sont arrêtés. L'un est un Albigeois de 28 ans, Thomas Barnouin, l'autre un Toulousain de 22 ans, Sabri Essid. « Des frappés qui étaient prêts à se faire sauter en Irak », lâche alors une source proche de l'enquête. Expulsés en France, les deux jeunes sont cueillis à Roissy par la police qui les attend." Des jeunes, en 2006, provenant des mêmes quartiers : "Issus des quartiers de la Reynerie, de Papus, des Izards, Stéphane Lelièvre, Imad Djebali, Mohamed Megherbi et Sabri Essid, ainsi que l'Albigeois Thomas Barnouin, partageaient leur vie entre petits boulots et prières à la mosquée. Ils s'étaient mis en tête de résister aux Américains présents en Irak". Regroupés par ce que la Dépêche résume ainsi sans hésiter : "c'était le bureau de recrutement pour le djihad islamique". Le salafisme toulousain, c'est donc comme le cassoulet du même coin ; aujourd'hui, c'est la version réchaufée qui est celle la plus prisée. Dès 2007, on savait tout de la filière, comme quoi les "entraînements" armés n'avaient pas lieu au Pakistan mais... en Egypte : 'La filière toulousaine, elle, fonctionnait depuis plusieurs mois, et aurait recruté une dizaine d'apprentis djihadistes, dont certains auraient rallié la Syrie en bus. « Il y avait une première phase d'endoctrinement, explique un enquêteur. Puis, les jeunes étaient envoyés en Égypte, pour des séjours de plus en plus longs. » Une phase de préparation, plus dure, était ensuite organisée : stages sportifs, conditionnement à base de vidéos de combats de djihad. Les candidats djihadistes devaient compléter leur « formation » en Égypte, dans une école du Caire, avant d'atteindre l'Irak, via la Syrie.'



Les officiers de la DGSE, qui les"cueillent" à leur descente d'avion de Syrie, à une époque où ce pays coopérait avec la France, Sarkozy commençant un rapprochement certain avec El-Hassad. Une DGSE qui en ramasse plein ses filets, de salafistes : "Le lendemain, le 14 février 2007, un vaste coup de filet est aussitôt déclenché par la Sous-direction anti-terroriste, la Police judiciaire et les RG. A Reynerie, à Papus, aux Izards, dans la banlieue parisienne et dans le village d'Artigat en Ariège, onze personnes sont interpellées. Dans les filets des enquêteurs : des jeunes de nationalité française. Certains sont originaires du Maghreb. Beaucoup sont de récents convertis à l'islam. À Artigat, un couple franco-syrien, âgé d'une soixantaine d'années, est soupçonné d'avoir joué les prédicateurs. Le 23 octobre 2007, dans la même affaire, lors d'une seconde vague d'interpellations dans la Ville rose et le Lot, les policiers arrêtent un Toulousain. Officiellement étudiant, il aurait formé au combat rapproché les deux candidats au Jihad. Des cités toulousaines à l'Irak, c'est toute une filière d'endoctrinement, d'acheminement et de combat que les policiers estiment avoir démantelée". La Syrie, comme zone d'envoi pour passer en Irak, et aller se faire un bel avenir (mais plutôt bref) de kamikaze, pour la simple raison que le gourou religieux ariègeois était (et est toujours) Syrien d'origine ! Des gens "surveillés de près" à l'époque : "les membres du réseau toulousain étaient étroitement surveillés depuis plusieurs mois par les renseignements généraux, la police judiciaire et la sous-direction antiterroriste (SDAT)." Au point de les attendre au bas de l'échelle de coupée à leur retour, ce que Bernard Squarcini ne sait plus faire (ou ne souhaite plus faire) en 2010 et 2011, au retour des deux voyages de Mohammed Mérah ! Le Figaro semble lui aussi depuis avoir oublié sa description forte du cas de Thomas Barnouin, devenu Thomas-Abdelhakim... et son itinéraire à la Merah !



Un Barnouin déjà très "écouté".... "Il quitte Médine juste avant un coup de filet des services de sécurité saoudiens. Mais sa trace n'est pas perdue pour autant. Les Saoudiens ont enregistré ses communications téléphoniques avec deux amis toulousains, auxquels il a donné rendez-vous en Syrie. Durant ses trois ans à Médine, Barnouin est resté également en contact avec les autres membres du réseau toulousain, démantelé en février par les policiers français. Parmi les huit hommes mis en examen, le cerveau du groupe, cheikh Olivier Qorel, 60 ans, Français d'origine syrienne, habitant Artigat, un village de l'Ariège. C'est lui qui convainc Sabri Essid, un compagnon de Barnouin, d'aller rejoindre ce dernier en Syrie, via la Bulgarie et la Turquie. « Tu retrouveras ta copine au paradis, mais avant vend ta voiture et règle tes dettes » lui enjoint Qorel."



Un prototype de Mohammed, que ce Barnouin, comme le décrit le Figaro, qui oublie régulièrement qu'il détient des trésors qui disent le contraire de ce que sa direction actuelle aux ordres lui fait écrire : "comme la plupart des 25 à 30 djihadistes français, partis depuis quatre ans dans l'ancienne Mésopotamie, il n'avait pas d'expérience militaire. Si ce n'est les exercices de combat rapproché, auxquels les membres du réseau toulousain s'entraînaient régulièrement à cinq heures du matin dans une cité de la Ville rose. « Pour être prêt physiquement le jour où l'on devrait partir pour la guerre sainte », reconnaîtra l'un d'entre eux. « Même si on est loin des camps d'al-Qaida en Afghanistan, ce n'est tout de même pas très rassurant », s'inquiète un policier. D'autant que sur leurs ordinateurs, les enquêteurs ont retrouvé un florilège de vidéos islamistes. L'une d'elles livrait la recette de fabrication d'une bombe artisanale. Une autre martelait que « la meilleure mort, c'est la mort au combat ». Pas besoin de s'entraîner au Pakistan, donc : une "cité" toulousaine suffit !



Une filière qui atterrit donc logiquement en prison, après un procès en juin 2009 où apparaît un autre nom, comme "sympathisant " : celui d'Abdelkader Merah "soupçonné mais pas inquiété" dit la Dépêche. Le frère de l'autre. Un frangin qui a une emprise notable sur son petit frère, une emprise religieuse que les policiers connaissent là encore très bien : "son voyage en Irak aurait été facilité par son frère Abdelkader connu des services de police français pour avoir participé à l'organisation d'une filière islamiste basée dans la région toulousaine en direction de ce pays. Ce frère et sa sœur, considérés comme les "religieux de la famille Merah", selon un policier de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), auraient séjourné au Caire dans une école coranique où la proximité avec les réseaux salafistes régionaux ont permis de mettre sur pied cette filière." C'est fou ce qu'il connaît sur cette famille, notre requin élyséen ! Et c'est fou ces facultés à ne pas se rappeler du rôle "militaire" du grand frère, à entraîner les jihadistes en Egypte, dans son fief !



Fait tout aussi sidérant : qui donc retrouve-t-on comme porteur d'oranges à la prison où sont enfermés les salafistes désireux de finir en martyrs explosés, dont le fils du futur beau père de Merah ? Mohammed Merah en personne, pardi, alors âgé de 19 ans ! "En 2008, Mohamed Merah avait obtenu un permis pour rendre visite en prison à Sabri Essid, ex-grutier, l'un des principaux protagonistes de ce groupe. Les services de police notent, à cette époque, qu'il lui apportait de l'argent. Sabri Essid a été arrêté, les armes à la main, à la frontière entre la Syrie et l'Irak." Un beau-frère embrigadé dans un mouvement salafiste, Mohammed qui le rempace, mais qui n'est pas considéré comme membre du groupe ? On croît rêver ! Cela, l'année même ou le "Squale" devient le directeur de la DCRI (officiellement créée le 1er juillet 2008 par décret du Président de la République, une nomination qui a l'art de rendre furax les anciens de la DST et des RG, forcés à fusionnner). Une volonté Elyséenne, de "surveiller de plus près le terrorisme", le dada d'un président qui crée alors avec "Mam" une sorte de Homeland Security à la française, calqué entièrement sur le modèle US. Un Président qui vient également de nous balancer il y a deux jours une tirade sur l'apprentissage de l'islamisme extrémiste en prison... à partir de l'exemple de quelqu'un qui ne l'était pas alors, en prison, mais qui allait porter des oranges à un taliban en herbe !!! Condamnera-t-il aussi les porteurs d'oranges ?



Les voyages, c'est bien connu, ça coûte. Neuf pays, ça coûte bonbon quand on ne gagne... rien, comme cela était le cas pour le tueur toulousain. De l'argent provenant de où alors ? A coup sûr, en 2007 et 2008, du groupe qui soutient notre autre salafiste près à aller jouer les bombes vivantes en Irak. Un mouvement qui envoie aussi ses recrues au Pakistan, via un obscur mouvement ouzbèke, ce qui va arriver illico à notre Mohammed, remplaçant sur le pouce du beau-frère purgeant sa peine de prison : il a en effet été "pris en charge par le Mouvement islamique d'Ouzbékistan (MIO), qui a pour tâche, depuis la chute des talibans en 2001, d'encadrer les "étrangers" qui viennent combattre "les infidèles" en Afghanistan ou les forces de sécurité pakistanaises qui tentent, périodiquement, de les déloger. Le MIO, qui intègre aussi les combattants déclarés d'Al-Qaida, opère sous l'autorité du Tehrik-e-Taliban Pakistan (Mouvement des talibans du Pakistan, TTP)."



Le Tehrik-e-Taliban ? Voilà qui devient passionnant. C'est en effet le mouvement de Baitullah Mehsud, celui qui est soupçonné d'avoir commandité l'assassinat de Benazir Bhutto ! Les américains, là-bas, avaient leur "envoyé spécial" de la CIA, Michael Headley, qui n'a pas fini mort, lui mais a hérité depuis de la prison à vie sans qu'on ne sache dans quelle prison exactement (façon Ali Mohammed, que sa propre femme cherche toujours aujourd'hui !) ou ont même un successeur (Raymond Davis), qui se fera bêtement prendre dans un sorte de rixe en pleine rue. Les français ne semblant avoir personne, là-bas. Sauf, il est vrai, un jeune "touriste" de 22 ans, qui arrive même à se faire engager dans les mêmes camps d'entraînement que surveillait également Headley... malgré un stature qui n'est pas d'athlète, et qui prend des photos de "touriste" de la région... avant de sagement les rapporter sur une clé USB à qui vous savez. Tout cela avant de se faire repérer pour "faits de droit commun" et de se retrouver à l'ambassade de France, renvoyé par la police pakistanaise, qui prend soin quand même d'aller consciencieusement vider sa chambre d'hôtel (car notre banlieusard a débarqué àl 'hôtel et non en chambre d'hôtes comme il en existe des milliers là-bas).



Un parcours bien singulier, donc, que celui de notre photographe du dimanche... pakistanais. Qui n'a donc pas beaucoup d'amis à Toulouse, à-t-on appris depuis, parlait peu, mais s'épanchait beaucoup chez les fonctionnaires de la DRCI. "Les éléments détenus par les services spécialisés montrent donc des liens entre le tueur présumé de Toulouse, le MIO et le TTP qui lui ont permis d'accéder à cette zone dangereuse, l'ont formé et encadré. Ces connexions avec des structures terroristes reconnues remettent en cause le statut de "personnage solitaire" de Mohamed Merah. Il est par ailleurs surprenant qu'il ait échappé au contrôle de la CIA ou de son homologue française, la DGSE, qui prêtent une attention toute particulière aux combattants djihadistes étrangers venus dans la région et qui constituent une menace terroriste majeure pour leur pays d'origine". Une DGSE qui n'a toujours pas digéré les prérogatives étendues dont s'est emparé le vorace Squale. Une DGSE qui serait passé à côté de la plaque... Mérah. Pas d'amis ou peu à Toulouse, mais un correspondant privilégié qui lui parlera, à sa demande, derrière la porte où il s'était retranché pour ses dernières heures d'existence : "c'est d'ailleurs avec ce fonctionnaire qu'il a "souhaité parlé" lors des négociations avec le RAID, semblant avoir établi avec lui "un rapport de confiance" avoue encore Squarcini. Un "rapport de confiance" qui en dit long, très long, sur les étranges relations entre le terroriste toulousain et les services secrets français.



Sur France-Info, avant-hier, un commentateur avisé avait évalué l'impressionnant arsenal saisi chez Mohammed Merah à environ 5000 euros au bas mot. Le jeune désœuvré, apprenti carrossier ayant acheté son stock grâce à des "cambriolages", présentés depuis hier comme de "simples larcins". Personnellement, voyez-vous, je verrais davantage des revenus provenant de ventes de photos, mais bon, je ne sais pas combien ça se vend, des paysages pakistanais où apparaîtrait un bout de camp du TTP ! Comme ça, par simple analyse et le flair émanant de la déclaration ahurissante de Squarcini, à peine le corps de son "correspondant" refroidi. Car il existe de sales histoires qui sentent fort mauvais, et celle d'un jeune de banlieue prenant aussi souvent l'avion pour se balader autant en deux ans à l'art de remuer des remugles que n'aurait pas renié l'as en la matière, Charles Pasqua, le formateur d'un certain... Nicolas Sarkozy. "Charly" avait en son temps réussi à envoyer au Burkina Faso des prétendus terroristes islamistes qui ne l'étaient en rien, islamistes. Envoyés là-bas sans le sou, ils y sont encore, et pensent toujours à lui, pour sûr.



Envoyé, revenu et... poussé à agîr, mais cette fois en France. Une chercheuse en histoire du monde arabe au Collège de France, Nora Benkorich va plus loin encore : « J'ai lu beaucoup de mémoires de djihadistes, et ce sont tous des radicaux très extrêmes dans leur islamisme. Le côté bon vivant de Mohamed Merah montre, au contraire, qu'il n'a pas agi par conviction profonde. Il faut donc s'interroger sur les moteurs de ses actions. Et parmi les hypothèses, il y a celle d'une commande, d'une influence exercée par d'autres personnes sur lui afin qu'il commette ces assassinats. » Ce qu'on découvrira peut-être en épluchant les participations de Mérah à des blogs et notamment au site du groupe Forsane Alizza, dissous par Guéant en janvier dernier, et ses forums où l'on pouvait s'inscrire pour un entraînement à la guérilla urbaine ! Bien monté en sauce, nôtre jihadiste devient vite chaud comme un cassoulet devenu trop bouillant !



Mohammed Méeah, lui, s'est retrouvé en apprenti-taliban ayant fleurté de trop près avec des apprentis sorciers, qui ont fini par décider de se passer de ses services après l'avoir bien manipulé. J'ai vu ce soir son appartement, ravagé par le tir de 300 cartouches diverses et l'envoi de grenades. En voyant sa cuisine, j'ai pensé à un tir de HellFire à partir d'un drone, dans les zones tribales du Pakistan ! On vient d'apprendre qu'il a été atteint de plusieurs balles (dont deux mortelles,) la plupart, souligne le médecin légiste, tirées dans le dos. Ce qui est en complète contradiction avec Amaury de Hautecloque, le responsable du RAID, dont le témoignage sur France 2 le 23 mars, laisse plutôt pantois. Ses armes "non létales" qui laissent 300 douilles vides et qui criblent quand même le corps du forcené restent une belle vue de l'esprit, comme l'est aussi la nouvelle idée de l'usage de lacrymogène, survenue après que le web ne se soit emparé des reproches à faire à ce ratage manifeste. Jamais auparavant il n'y avait eu allusion à son usage. Son "je donne l'ordre à mes hommes de ne pas riposter", les riverains on pu l'entendre, en effet, et nous aussi en direct sur BFM : Mérah a tiré une trentaine de projectiles (il aurait possédé sur place trois Colt 45), en face dix fois plus. Son "honoré de se mesurer au Raid" une auto-admiration même pas déplacée, plus que gênante. Les crimes de Merah ont été les pires de ses seize dernières années en France Mais j'aurai aimé, tout criminel odieux qu'il ait pu être, l'entendre nous dire ce qu'il faisait en novembre 2011 dans le bureau de quelqu'un venu hier nous dire qu'il venait lui rapporter ses photos de vacances d'un endroit régulièrement bombardé par des drones, car infesté de terroristes talibans qui tuent eux aussi femmes et enfants.



On a parlé de fiasco, pour l'intervention. Personnellement, je pense que pour Bernard Squarcini c'est une superbe réussite. La France ne possède pas de drone tueur, mais arrive à faire exactement la même chose sans.



acora vox

L'étrange relation entre Mohamed Merah et Bernard Squarcini - AgoraVox le média citoyen

Bernard Squarcini : "Nous ne pouvions pas aller plus vite"




Le directeur central du renseignement intérieur, Bernard Squarcini, répond aux interrogations sur la surveillance de Mohamed Merah.




Jeudi, le ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, a affirmé : "Je comprends qu'on puisse se poser la question de savoir s'il y a eu une faille ou pas." C'est une mise en cause de vos services ?



Le sens de sa phrase a été dénaturé. Des personnes, dont des enfants, sont morts d'une façon particulièrement cruelle, et nous nous posons forcément la question: est-ce qu'on aurait pu faire différemment? Est-ce qu'on a raté quelque chose? Est-ce qu'on a été assez vite? Mais il était impossible de dire dimanche soir : "C'est Merah, il faut aller l'attraper." Lui-même n'avait d'ailleurs pas prévu d'attaquer l'école juive lundi matin. Selon ses déclarations lors du siège par le RAID, il voulait tuer un autre militaire, mais il est arrivé trop tard. Et comme il connaît bien le quartier, il a improvisé et a attaqué le collège-lycée Ozar-Hatorah.



Mohamed Merah vous a parlé pendant le siège du RAID ?



Il a souhaité parler avec le policier de la direction régionale du renseignement intérieur (DRRI) de Toulouse qui l'avait rencontré en novembre 2011. Il est intervenu au cours des négociations. Mohamed Merah semblait avoir un rapport de confiance avec lui. Il s'est confié, il a coopéré. Il nous a dit où était le scooter ou les deux voitures. Le courant passait bien. Non sans cynisme. Il a même dit à ce policier: "De toute façon, je devais t'appeler pour te dire que j'avais des tuyaux à te donner, mais en fait, j'allais te fumer." C'est un Janus, quelqu'un qui a une double face.



Il faut remonter à la cassure de son enfance et à ses troubles psychiatriques. Pour avoir fait ce qu'il a fait, cela relève davantage d'un problème médical et de fanatisme que d'un simple parcours djihadiste. Selon le policier de la DRRI, c'est sa deuxième personnalité qui a parlé, mercredi. Il lui a raconté la deuxième tranche de vie qu'il n'a pas voulu lui évoquer en novembre. Il a fini leur entretien, en quelque sorte.



Le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a fait le lien entre Mohamed Merah et des salafistes arrêtés en 2007, à Toulouse et en Ariège, dans une affaire de filière djihadiste irakienne. Etait-il sous surveillance à ce moment-là ?



Il n'y a pas de lien, en dehors de mandats qu'il a envoyés à l'un des condamnés en prison, ce qui peut être une simple solidarité de cité. Il a à peine 18 ans à l'époque des faits. Il ne peut pas apparaître comme un activiste chevronné. Il était plutôt un petit délinquant déjà connu pour plusieurs faits : vols avec violences, vols à l'arme blanche. C'est une conduite sans permis qui le fait basculer, et emprisonner dix-huit mois, puisque ses sursis tombent à la fin de sa majorité pénale. Il trouve injuste la sanction qui lui est infligée et il part en rébellion contre les institutions.



Selon les déclarations qu'il a faites lors du siège par le RAID, il s'est autoradicalisé en prison, tout seul, en lisant le Coran. C'est un acte volontaire, spontané, isolé. Et il dit que de toute façon, dans le Coran, il y a tout. Donc, il n'y a aucune appartenance à un réseau.



Il n'a pas été victime d'une filière de radicalisation en prison ?



Il semble s'être radicalisé seul.



C'est un profil particulier, donc ?



Il n'a pas les attributs extérieurs du fondamentaliste. Lors de ses condamnations par le tribunal pour enfants, une fragilité psychologique est détectée. Il a mal supporté le divorce de ses parents, et son père est retourné en Algérie. Il noue une relation particulière avec sa mère. Il vit de petits boulots, qu'il garde un mois, un mois et demi. En fait c'est sa mère qui subvient à ses besoins logistiques. Et puis il nous dira à travers la porte, mercredi, que c'est son business et ses petits larcins qui lui permettent d'accumuler de l'argent et d'acheter des armes.



Quand est-il apparu sur vos radars ?



Après un simple contrôle routier à Kandahar, en Afghanistan, en novembre 2010, qui est effectué par la police afghane. Ils le remettent aux Américains qui l'ont forcé à remonter dans l'avion pour rentrer à Kaboul. La direction de la sécurité et de la protection de la défense (DPSD), un des services de renseignement des armées, nous a signalé l'incident.



Qu'a-t-il fait pendant ce premier voyage ?



Il a passé du temps chez son frère auCaire après avoir voyagé au Proche-Orient : Turquie, Syrie, Liban, Jordanie, et même Israël. A Jérusalem, la police découvre un canif dans son sac puis le relâche. Ensuite, il se rend en Afghanistan en passant par le Tadjikistan. Il prend des parcours qui sont inhabituels et n'apparaît pas sur nos radars, ni sur ceux des services extérieurs français, américains et locaux. Il arrive le 13 novembre à Kaboul, il est contrôlé le 22 novembre à Kandahar et il rentre en France le 5 décembre 2010.



Que se passe-t-il ensuite ?



Nous faisons une enquête pour voir ce qu'il vaut. Mais il n'y a rien. Pas d'activisme idéologique, pas de fréquentation de la mosquée.



Pourquoi l'avez-vous convoqué à l'automne 2011 ?



Parce que nous voulons recueillir des explications sur son voyage en Afghanistan. C'est un entretien administratif sans contrainte, puisque nous n'étions pas dans un cadre judiciaire.



Il s'y soumet sans problème ?



Le fonctionnaire qui l'a reçu n'a pas senti une volonté d'esquiver, au contraire. Mohamed Merah l'appelle le 13 octobre 2011 car il n'est pas en France à ce moment-là, il est au Pakistan. "Dès que je rentre, je vous contacte", a-t-il dit. Le 3 novembre, il rappelle de l'hôpital Purpan, à Toulouse, ou il est hospitalisé pour une hépatite. "Dès que je sors, je viens vous voir", assure-t-il. Il fait preuve d'une excellente coopération, d'éducation, et de courtoisie.



Il vient à l'entretien avec sa clé USB qui contient ses photos de voyages. Il demande à s'allonger sur la table pour pouvoir discuter parce qu'il est malade, dit-il. Il explique en photos tout le parcours touristique qu'il a réalisé au Proche-Orient, en Afghanistan et au Pakistan.



Son deuxième voyage au Pakistan ne vous a pas inquiété ?



Il n'est resté que deux mois au Pakistan. Il dit alors que c'était pour chercher une épouse. Lors du siège par le RAID, il nous a dit qu'il était allé au Waziristan et qu'il y avait encore là-bas d'autres Français comme lui. Mais à l'époque, ni les services pakistanais, ni les Américains, ni la DGSE ne nous ont alertés.



Où a-t-il appris à combattre ?



Il a déclaré au RAID qu'il avait bénéficié d'un entraînement particulier au Waziristan par une seule personne. Et pas dans les centres de formation, où il aurait pu se faire repérer puisqu'il parlait français.



Pourquoi les Américains l'ont-ils inscrit sur leur liste d'exclusion aérienne, et sur celle du FBI pour lien avec Al-Qaida ?



Probablement parce qu'il a été contrôlé à Kandahar.



Son frère n'était pas surveillé ?



Ce n'est pas le même type de personnalité. Le frère et la sœur sont partis en juillet 2010 dans une école coranique en Egypte. Ils n'ont pas la même formation. Il nous l'a dit : "Moi je n'ai pas confiance en mon frère, je ne lui ai jamais dit ce que je faisais. Ni à ma mère."



Après l'entretien de novembre 2011, que se passe-t-il ?



Des dispositions ont été prises, la DCRI l'a notamment inscrit au fichier des personnes recherchées pour être informé en cas de contrôle et de déplacements.



Quand avez-vous commencé à travailler sur le meurtre des militaires, le 15 mars ?



La DCRI a commencé à échanger avec la police judiciaire dès le vendredi 16 mars. Le samedi au soir, ils nous ont transmis des données à cribler dans notre documentation. Le service a travaillé tout le week-end sur les propriétaires de T-Max, de 11.43, les habitués des stands de tir, les noms liés aux adresses IP qui se sont connectées à l'annonce du premier militaire, 24 000 données au total. On s'interroge encore à ce moment-là sur la piste de l'ultradroite, du djihad ou d'un fou.



Vos recherches isolent alors le nom de la mère de Mohamed Merah, qui correspond à l'une des adresses IP ?



Oui, mais, le dimanche soir, il n'y a pas que ce nom-là. Nous donnons les réponses aux criblages à la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire, et on demande à ceux de nos services qui ont émis les dossiers sur ces noms d'approfondir la recherche.



Donc, le nom de Merah ne déclenche pas de processus d'alerte ?



Non. Mais nous savons dimanche soir que Mme Aziri est la mère de Mohamed et Abdelkader Merah. Son nom apparaît dans la liste des gens qui ont consulté une annonce de vente de moto sur Leboncoin. fr. Mais elle a cinq enfants, cela fait six personnes qui auraient pu se connecter. Cela ne fait pas encore d'elle et de ses deux fils des suspects. De plus, il n'y a pas d'éléments qui montrent de contact direct entre le vendeur de la moto et un membre de la famille Merah.



Est-ce que le profil des militaires tués, d'origines maghrébine et antillaise, vous a fait perdre du temps ?



Non, à ce moment-là, tout le monde est dans le brouillard. Il n'y a pas de piste privilégiée. Le lundi, c'est l'attaque du collège Ozar-Hatorah. Le parquet de Paris se saisit de l'affaire, et nous nous trouvons en cosaisine. Là, avec l'école juive, la façon dont il a ciblé, l'hypothèse djihadiste reprend du poids. Nous gardons encore à l'esprit celle de l'ultradroite.



Est-ce que les deux méthodes de travail, PJ et renseignement, ne se sont pas percutées ?



Au contraire, nous avons gagné du temps. Le renseignement débroussaille, et évite que l'enquête de la PJ soit polluée. Avec la tuerie de l'école, on se retrouve face à une trajectoire criminelle bizarre. Il n'y a pas de revendication, il n'y a qu'un lien géographique.



Le lundi soir, la liste de suspects potentiels s'est réduite ?



Notre direction régionale nous donne une liste de six noms d'islamistes radicaux et six noms de membres de l'ultradroite. Ils ont un profil qui peut laisser penser qu'ils ont pu basculer.



Dans la liste des islamistes, il y a les Merah ?



Seulement Mohamed.



Comment quelqu'un jugé inoffensif en novembre devient un tueur potentiel en mars ?



C'est quelque chose d'atypique, d'irrationnel et de violent. Mohamed Merah, c'est quelqu'un qui a un comportement violent dès sa petite enfance, qu'on ne peut rattacher à aucune typologie.



Le mardi 20 mars, vous vous concentrez sur Mohamed Merah.



Lors de réunions sur la stratégie de l'enquête, les services ont souligné qu'il pouvait correspondre au profil, mais qu'il était indispensable d'interpeller en même temps la mère, Abdelkader, et Mohamed. Il faut alors des éléments pour convaincre un juge des libertés et de la détention d'autoriser des perquisitions de nuit. Comme ce sont des islamistes présumés, il fallait intervenir avant l'heure de la première prière.



Vous pensiez encore que cela pouvait ne pas être lui ?



Oui, cela pouvait être une de ses relations. On n'a pas de certitude à cette heure-là.



Est-ce que ce dossier change votre grille de lecture du phénomène islamiste ?



C'est évident qu'il peut y avoir d'autres solitaires comme lui. C'est la crainte de tous les services de renseignements mais cela ne change pas fondamentalement notre grille de lecture du phénomène terroriste.



Ne craignez-vous pas une exploitation politique de cette affaire ?



Ces problèmes-là ne sont ni de droite, ni de gauche. Ce sont des problèmes techniques. Nous sommes soulagés de l'avoir trouvé. Malheureusement, il y a eu des victimes innocentes, mais il y aurait pu en avoir plus. Nous ne pouvions pas aller plus vite. Nous aurions bien aimé.



Laurent Borredon et Jacques Follorou


LE DÉVELOPPEMENT DE L'ISLAMFONDAMENTALISTE EN FRANCE

http://www.cf2r.org/images/stories/RR/rr1-islam.pdf

Sur les 15 millions de Musulmans recensés en Europe de l'Ouest, plus de 5 millions sont

installés en France qui est l'Etat occidental comptant la plus forte proportion de Musulmans au sein

de sa population.

Depuis le début des années 2000, le phénomène islamiste ne cesse de croître, essentiellement

concentré dans les banlieues des grandes agglomérations. Les extrémistes sont devenus des acteurs

majeurs des zones sensibles et les signes de progression de l’islam radical s'observent chaque jour. Le

ministère de l’Intérieur évalue à 50 000 le nombre de nouveaux convertis dans notre pays en quelques

années. Dans les mosquées fondamentalistes, l'islam est inculqué aux populations par des

prédicateurs radicaux, souvent étrangers, qui tiennent un discours de rupture vis-à-vis des

institutions républicaines et prêchent un racisme antifrançais. Les islamistes se consacrent à la remise

en cause des lois et coutumes de la société française pour y substituer leurs pratiques traditionnelles,

en totale opposition avec nos institutions démocratiques et laïques. Malgré la faible proportion

d'islamistes parmi la communauté musulmane française, leur activisme virulent est d'autant plus

préoccupant qu'il n'y a pas de frontière étanche entre l'islam fondamentaliste et le terrorisme.

Or, la lutte contre le terrorisme islamiste, consécutive aux attentats du 11 septembre 2001 et à

la campagne d'Afghanistan, a révélé l'existence de filières de recrutement djihadistes sur notre

territoire, à Paris comme en province. Ainsi, nos banlieues sont des viviers de recrutement, depuis

lesquelles plusieurs centaines de jeunes Français musulmans se sont déjà rendus en Bosnie, en

Tchétchénie, en Afghanistan ou en Irak, combattre aux côtés des moudjahidines et y recevoir une

formation terroriste. Les motivations de ces départs relèvent à la fois du contexte sociologique

spécifique de la troisième génération d'immigrés, du manque de repères de la partie la plus déshéritée

de la jeunesse française - pour laquelle le passage par les camps du djihad semble donner un sens à

l'existence - et de la situation au Moyen-Orient, où le conflit israélo-palestinien et l'occupation de

l'Irak renforcent la victimisation des islamistes radicaux.

Mais les effets de l'islamisme ne concernent pas seulement la sécurité intérieure ; ils touchent

aussi la sphère économique et les activités de certaines entreprises. La pression islamiste s'exerce dans

les entreprises, principalement selon deux modalités : le prosélytisme militant et contestataire et le

développement de trafics susceptibles d'alimenter la cause du djihad. Cette poussée fondamentaliste

dans les entreprises impacte sur certaines activités économiques, notamment en générant de nouveaux

risques sectaires et criminels, propres aux zones de consommation urbaines et périurbaines dans

lesquelles elles sont implantées. Cela n'exclut nullement l'hypothèse d'attentats contre les acteurs

économiques.